Dans leur regard : La véritable histoire des « cinq de Central Park », condamnés à tort pour le viol d'une joggeuse

Avec la mini-série « When They See Us », la cinéaste Ava DuVernay revient sur la condamnation à tort de cinq adolescents. Une erreur judiciaire sur fond de discrimination raciale.

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C’est un fait divers qui a ébranlé l’Amérique, à la fin des années 80. Alors que les yuppies de Wall Street roulent littéralement sur les billets de banque, d’autres quartiers de la ville sont décimés par la culture du crack. Le 19 avril 1989, au cœur de Central Park, une jeune femme est retrouvée à demi-consciente, après avoir été violée et rouée de coups. Trisha Meili, 28 ans, employée d’une banque d’investissement faisait son jogging, lorsqu’elle est agressée sans vergogne. Elle survit à cette attaque, mais le crime devient une affaire d’État, le symptôme de la violence qui a embrasé la ville, même dans ses coins les plus bourgeois, et des tensions raciales prépondérantes. Ed Koch, maire de New York à l’époque, estime même qu’il s’agit du « crime du siècle ».

Cette même nuit, la police reçoit des appels les alertant qu’un groupe de trente à quarante adolescents terrorise des passants dans Central Park. Un vieil homme se fait voler ses courses, un ancien marine se fait frapper avec un tuyau en métal. Plusieurs jeunes garçons sont arrêtés, dont Kevin Richardson et Raymond Santana qui affirmeront avoir seulement été témoins des faits de violence. Puis, à la découverte du corps de Trisha Meilli, la police interpelle trois autres adolescents d’Harlem : Yusef SalaamKorey Wise et Antron McCray. « Je ne comprenais pas ce qui se passait, j’avais juste envie de rentrer à la maison », racontera plus tard Korey Wise, durant une conférence à New York en 2013. Soumis à des interrogatoires de presque 30 heures, les garçons - à l’exception de Yusef Salaam - finissent par confesser leur culpabilité dans des enregistrements. La police ne trouve toutefois pas une once de preuve confortant ces déclarations, et les suspects - quatre noirs et un hispanique, âgés de 14 à 16 ans - ont un casier judiciaire vierge. Ce qui n'empêche pas la presse de les dépeindre comme un gang de criminels, « une meute de loups », selon le New York Daily News, qui s'est acharnée sur sa victime. En plein milieu de ce tsunami médiatique, Donald Trump part en croisade contre les « cinq de Central Park », payant même des encarts dans la presse new-yorkaise pour demander leur condamnation à mort.  

En août 1990, marqué par les vidéos des aveux et le témoignage de la victime, un jury déclare trois des adolescents coupables (Yusef Salaam, Raymond Santana et Antron McCray), tandis que Kevin Richardson et Korey Wise sont jugés séparément avec un même dénouement. Un juré se rappelle des contradictions dans le témoignage de ce dernier : « Sa confession n’avait aucun sens. Cela ne collait pas. Plusieurs jurés m’ont poussé à aller dans leur sens », a expliqué Victoria Bryers, sur ABC, expliquant que cette décision a été « le plus gros regret de [sa] vie » pendant trente ans. Les suspects sont condamnés à des peines allant de 5 à 15 ans, tandis que Korey Wise, jugé comme un adulte, est envoyé à la prison de Rikers Island.

En 2002, alors que certains des adolescents ont déjà purgé leur peine, un violeur multirécidiviste, Matias Reyes, révèle être le seul coupable du crime. Son ADN correspond à celui retrouvé sur les lieux, et il livre même des détails troublants sur l’agression. Les « cinq de Central Park » sont alors innocentés, et attaquent la ville de New York, notamment pour poursuites malveillantes et discrimination raciale. Au terme d’un accord, ils reçoivent une compensation financière de 40 millions de dollars. Si trois d’entre eux décrocheront en juin leur diplôme du lycée, cette affaire a marqué les années formatrices de leur vie. Et surtout, comme le démontre le documentaire réalisé en 2012 par Ken BurnsSarah Burnset David McMahon, elle est le parfait exemple d'une justice à deux vitesses pénalisant les minorités. Rien d'étonnant à ce qu'Ava DuVernay, réalisatrice du documentaire Le 13e sur l'incarcération de masse des Afro-Américains, décide de leur rendre justice avec la mini-série Netflix When They See Us. Mieux vaut tard que jamais... 

When They See Us, le 31 mai 2019 sur Netflix. 

 
 

Beeso

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